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Témoignage de Sœur Anne-Claire pour son jubilé

Oui, la croix s’est dressée, comme dans nos campagnes, à bien des carrefours … mais cette Croix est glorieuse.

Au cours des vigiles de la Croix Glorieuse, Sœur Anne-Claire a rendu grâce pour ses 25 ans d’engagements.

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« Tu seras ma louange dans la grande assemblée » (Ps 21, 26)

« Je te rendrai grâce dans la grande assemblée,

Avec un peuple nombreux, je te louerai » (Ps 34, 18)

25 ans… anniversaire, occasion de jeter un regard sur le chemin parcouru, un regard qui se fait action de grâce pour la fidélité du Seigneur : Car éternel est son Amour (Ps 135, 1).

Et puisqu’il m’est donné, comme dit le psaume, de « rendre grâce au Seigneur dans une grande assemblée », de louer le Seigneur « avec un peuple nombreux », et bien, oui, je rends grâce au Seigneur dont l’amour s’étend d’âge en âge, et dont la fidélité ne déçoit pas.

Si je regarde en arrière, il n’y a pas que des heures de bonheur sans partage ! il n’y a pas seulement de pures joies ! Il y a eu de grandes joies, mais aussi des épreuves, des obstacles sur la route. Oui, la croix s’est dressée, comme dans nos campagnes, à bien des carrefours … mais cette Croix est glorieuse. C’est ce que nous célébrons ce soir, c’est le mystère auquel tout membre de la Communauté est consacré, et dont chacun fait l’expérience dans sa propre vie, dont il est le témoin tant dans la vie de ses frères et sœurs que dans celle des personnes vers qui il est envoyé.

Mon action de grâce évoquera ce soir un Amour, et deux amis du ciel.

Un amour : c’est Jésus. Apprenant que j’étais rentrée à la Communauté à 18 ans, et engagée définitivement à 25, une jeune de la paroisse me demandait il y a quelques jours : « Mais comment tu as fait pour savoir que c’était pour toujours ? » La réponse qui m’est venue était simple, adaptée à son âge, et à celui que j’avais à l’époque évoquée : « en fait, je suis tombée amoureuse de Jésus … » Mais je ne devrais pas dire que je suis tombée amoureuse, mais que j’ai été élévée, relevée amoureuse, car l’amour du Seigneur met debout, et cela jour après jour.

Oui, il n’y a pas d’autre explication que celle qu’à sa manière chante l’apôtre Paul : l’amour du Christ m’a saisi … et m’a conduit à la communauté. Il m’a été donné de découvrir très tôt l’amour de Jésus en croix, qui m’a aimé et s’est livré pour moi : un amour qui donne envie de se donner sans retour, un amour qui donne envie de crier à tous les hommes : « Oui, le Seigneur est bon » ; cet amour de Jésus a suscité mon amour pour lui, un amour qui sais que, malgré les vicissitudes de la vie, il ne pourra pas être déçu. Après, dans les joies et les peines, j’ai fait l’expérience de la présence constante de Dieu dont l’Amour est toujours fidèle, j’ai compris peu à peu que mes infidélités, (nos infidélités) ne lui font pas peur ; je peut témoigné que chaque fois que je me suis éloignée, lui m’a attirée encore et encore pour me faire revenir à ce qui fait le vrai de ma vie.

Deux amis célestes … Que tous les autres me pardonnent, mais il faut bien choisir. J’évoquerai donc ce soir sainte Claire et saint Augustin.

claire2Claire m’a fait signe bien avant le 14 septembre 90. Je l’ai « rencontré » un soir en lisant dans un journal une courte présentation de sa vie. C’était dans l’année de mes 16 ans. J’ai été boulversée par ces mots : « Claire avait compris que l’amour du Christ est tout, tient lieu de tout, emplit tout. » C’est parce qu’elle m’a fait signe que je suis là aujourd’hui, et que je porte son nom. Son témoignage m’a donné l’audace de partir, un peu comme elle, à la suite de Jésus, à 18 ans ! Mais Claire m’a surtout appris à regarder Jésus, à le regarder pauvre et crucifié, dépouillé de tout par amour pour les hommes. Elle m’a appris à regarder la croix avec tendresse, espérance et action de grâce. Claire me rappelle sans cesse à ce regard vers Jésus qui donne sens à toute chose en ma vie. Elle me rappelle que « les montagnes peuvent s’écrouler, Dieu fera tout … comme il promet ». Claire m’invite sans cesse à cet émerveillement devant le Don de Dieu : « Merci Seigneur de m’avoir créée, appelée, sanctifiée », dira-t-elle au soir de sa vie.

Claire m’a appris aussi que la vie chrétienne est faite de grandes amitiés. Celle qui la lia à François, dont elle se disait « la petite plante », est faite d’humilité et de réconfort mutuel. Elle se nourrit de peu de paroles, mais de quelques mots au bon moment, pour construire, consoler, fortifier. L’amitié fraternelle qui la lia aussi à ses sœurs est faite de multiples délicatesses et tendresses. Sur ce point Claire et Thérèse ont bien des points communs.

La deuxième amitié céleste que je veux évoquer ce soir est celle d’Augustin. Car avant d’être un objet d’études, Augustin est d’abord un ami… Lui aussi m’a donné d’entrer plus profondément dans la contemplation du mystère de la Croix glorieuse, un mystère qui se révèle déjà quand Dieu se fait homme, quand il vient cacher sa divinité dans notre humanité, quand il prend notre chair mortelle afin de mourir pour nous, afin de nous arracher à la mort, afin de nous éléver avec lui. Augustin m’a appris à me laisser éblouir par ce mystère de l’humilité du Christ. Il m’apprend qu’il n’y a pas d’autre chemin pour rejoindre le Seigneur que la voie de l’Humilité que Jésus a empruntée, et qu’il s’est devenu lui-même.

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Il m’apprend aussi que cette voie est celle de la charité fraternelle. Il m’invite sans cesse à rechercher avec tous l’unité et la paix. Car où sont amour et charité, Dieu, qui est amour est présent. Le Christ, grand pour nous créer, humble pour nous recréer, nous en montre le chemin.

Avec Claire, avec Augustin, je rends grâce au Seigneur dans la grande assemblée. Je rends grâce au Seigneur dont l’amour, qui nous a saisi, ne passera pas.